Chakaiseki Akiyoshi - Premières impressions
Indéniablement le reflet d'un certain Japon à Paris, le restaurant répondant au nom un tantinet pompeux de "Chakaiseki Akiyoshi" a ouvert en janvier 2023. Il a déjà rassemblé des critiques très positives notamment pour l'accueil par l'okami-san, ma
Indéniablement le reflet d'un certain Japon à Paris, le restaurant répondant au nom un tantinet pompeux de "Chakaiseki Akiyoshi" a ouvert en janvier 2023. Il a déjà rassemblé des critiques très positives notamment pour l'accueil par l'okami-san, mais aussi très négatives sur l'addition qui fait sérieusement mal au portefeuille. L'expérience vaut-elle le prix?
Les gourmets du monde et notamment français ont tous entendu parler de la cuisine kaiseki (se prononce kaïsseki). En réalité, il ne s'agit pas tant d'une cuisine que d'un type de repas (précisions à venir dans un autre article). Le chef Yuichiro Akiyoshi a choisi le terme "cha-kaiseki" ou "kaiseki de thé" pour désigner son restaurant éponyme bien qu'il soit le premier à dire que le cha-kaiseki n'est qu'un retour aux origines du kaiseki. Un terme relativement récent – on pourrait presque appeler cela une mode – où, au lieu de dire tout simplement "kaiseki", qui est venu à englober tout et n'importe quoi, on souligne l'aspect "thé" du kaiseki pour le revoir selon une définition plus stricte et classique du terme.
Retour aux sources de la cuisine kaiseki
Voilà pourquoi les clients non-Japonais qui attendent un repas mystique deux-en-un avec cérémonie de thé en grande pompe, sont surpris et désemparés quand ils n'ont qu'un bol de matcha avec le dessert. Fouetté au chasen (fouet pour matcha), et alors?
C'est comme la râpe à fromage pour le gruyère. Un outil indispensable mais un outil, le plus performant pour l'objectif, qui est d'obtenir un liquide vert avec une mousse parfaitement couvrante et uniforme sur la surface. Le chef, qui n'a jamais prétendu être maître de thé bien qu'il ait suivi les enseignements des trois principales écoles, n'a d'autre aspiration que de servir un bon repas – dans les règles de l'art de la cuisine kaiseki.
La mouvance Hyotei
L'un des premiers 3 étoiles Michelin du Japon, Hyotei est un restaurant kyotoïte avec 400 ans d'histoire. Situé à l'entrée d'un temple, il était à l'origine une maison de thé avec toute la sobriété que cela impliquait (pensez une bicoque d'une pièce, tatami au sol, où un moine vous prépare un bol de thé matcha, sourire furtif flottant aux lèvres). Aujourd'hui devenu un restaurant composé de petites maisons indépendantes à l'ancienne, servant de salons privés et d'une salle plus moderne avec tables et chaises, on y sert le petit-déjeuner, le déjeuner, le diner, ainsi que des bento (les bento traditionnels de Kyoto sont de vrais repas travaillés, servis et parfois livrés dans des boites laquées. Ils coûtent généralement entre 60€ et 200€). L'ambiance est relativement modeste car Hyotei défend le kaiseki sobre et peu ostentatoire de ses origines. Il a d'ailleurs été l'un des premiers à se revendiquer "cha-kaiseki".
Le chef Akiyoshi y a travaillé pendant dix ans. Hyotei est sa référence, son modèle, son aspiration. Je ne sais pas pourquoi il a choisi Paris pour étendre ses ailes. Peut-être parce que son épouse travaillait chez Chaumet. Mariage de maisons historiques ?
Et ce prix, alors?
Je pense que c'est ce qui a fait le plus jaser. Le prix. 240€ pour le déjeuner, 360€ pour le diner. Depuis l'ouverture jusqu'à la fin du mois, des menus réduits sont proposés, 120€ et 180€ respectivement. Cela choque, d'autant que le restaurant est totalement inconnu et situé dans une rue obscure du 15ème arrondissement. Mais peut-être, quand on réfléchit au prix d'un repas similaire au Japon, du menu de Hyotei qui coûte 300€ environ hors boissons sans être considéré comme excessivement cher, on comprend un peu.
Il y a aussi le fait que le restaurant ne peut accueillir qu'une dizaine de couverts au comptoir, avec une seule table de six dans un coin. Le menu classique de kaiseki est composé d'une succession de petits plats souvent nommés d'après la vaisselle ou la méthode de cuisson. À l'instar d'un menu dégustation dans un restaurant gastronomique français, il exige un certain temps de service, incompressible.
Mais cela ne veut pas dire que nous sommes prêts à payer le prix fort...
(à suivre)